Cameroon Policy Analysis and Research Center --- Centre d'Analyse et de Recherche sur les Politiques Economiques et Sociales du Cameroun

LETTRE OUVERTE A MONSIEUR BARNABE OKOUDA, DIRECTEUR DU CENTRE D’ANALYSE ET DE RECHERCHE SUR LES POLITIQUES ECONOMIQUES ET SOCIALES DU CAMEROUN, THINK TANK GOUVERNEMENTAL

6 juillet 2021

Très cher ami et AINE ANCIEN VOGTOIS,

Apres que nous nous soyons perdus de vue pendant environ deux années, j’ai pris connaissance par voie de presse de la publication de ta Note Rapide de Politique économique N°7 adressée au Gouvernement de la République en ce début de mois de juin 2021.

Cette Note rapide de politique économique a pour titre : «STRATEGIE NATIONALE DE DEVELOPPEMENT 2030 ET NOUVEAU PROGRAMME ECONOMIQUE TRIENNAL 2021-2024 : QUELLES CAPACITES ET COMPETENCES ESSENTIELLES NECESSAIRES POUR REUSSIR LE MARIAGE (DES INCOMPATIBLES) ? »

Cher grand frère, nous étions convenus au téléphone, d’en parler de vive voix. Mais j’ai fait le choix de te répondre par  cette lettre ouverte (l’un n’empêchant pas l’autre), parce qu’il s’agit d’un sujet qui engage  le destin de toute une Nation. Aussi sommes-nous au devoir de le sortir des cabinets et salons feutrés, pour le porter à la connaissance des millions de camerounais dont les vies en seront profondément impactés au cours des prochaines années. Ils ont le droit de connaitre les  déterminants profonds du sens que ne manquera pas de prendre leurs existences  respectives au cours des prochaines années. Mes lecteurs sont majoritairement des citoyens très ordinaires envers qui j’ai un devoir, mieux encore une obligation de simplification des concepts relativement abscons qui structurent le titre de ta publication, et plus généralement son contenu.

Je vais essayer…

  1. POUR COMPRENDRE LE TITRE DE TA NOTE RAPIDE DE POLITIQUE ECONOMIQUE ADRESSEE AU GOUVERNEMENT DE LA REPUBLIQUE

Le titre de ta note énonce l’incompatibilité générique qui existerait a priori entre d’une part les investissements massifs prévus pour mettre en œuvre de la «Stratégie Nationale de Développement 2030» ou SND30 et d’autre part le retour de notre Pays sous les fourches caudines de l’ajustement structurel, actée le 25 juin 2021 par le Conseil d’Administration du Fonds Monétaire International, au terme de plusieurs semaines de négociations avec le Gouvernement de la République.

Ton énoncé de la dite incompatibilité est fondée sur le Communiqué du FMI  qui précise que « le programme limitera les emprunts non concessionnels aux projets qui sont essentiels […] ».  

Grand frère, là où l’expert des Programmes du FMI que tu es voit un « habillage diplomatique » d’un contingentement budgétaire annoncé, le modeste développeur de projet que je suis y voit plutôt … UNE GIGANTESQUE FENETRE D’OPPORTUNITE POUR LA MISE EN ŒUVRE EFFECTIVE DE LA SND30… AFIN QUE NOS ENFANTS VIVENT DANS UN PAYS MEILLEUR QUE CELUI CONNU PAR LEURS PARENTS, SANS AVOIR BESOIN DE S’EXPATRIER.      

Voilà  cher ainé ! Nous y sommes.

La gestion peu orthodoxe, pour dire le moins, des finances publiques au cours des 15 dernières années nous reconduit dans l’Ajustement structurel. Nous en étions pourtant sortis en 2006, après 20 années de lourds sacrifices (1986-2006) dont notre génération paya certainement le plus lourd tribut. Pour la compréhension du citoyen ordinaire, l’ajustement structurel consiste à mettre la gestion des finances publiques de notre Pays sous le contrôle du Fonds Monétaire International, « l’œil et les oreilles » de la communauté financière internationale, c’est-à-dire ceux qui nous prêtent de l’argent. D’une manière générale, cette mise sous ajustement structurel consiste entre autres en un encadrement strict de la Capacité d’un Etat à prendre de nouveaux engagements financiers en termes d’endettement, au moins jusqu’à ce que l’orthodoxie soit rétablie dans la gestion de ses finances publiques.

EN TERMES SIMPLES LA QUESTION QUE TU POSES EST LA SUIVANTE :

EST-CE QU’UN PAYS SOUS AJUSTEMENT STRUCTUREL PEUT-IL AVOIR ET METTRE EN ŒUVRE LES AMBITIONS DE DEVELOPPEMENT ENONCEES DANS LA SND30 ?  C’EST-CE QUE TU APPELLES « MARIAGE DES INCOMPATIBILITES ». Un « Mariage des compatibilités » constitue le fondement d’une famille heureuse tandis qu’un « Mariage des Incompatibilités » pose les balises d’un ECHEC, qui peut prendre la forme d’un divorce, ou pire d’un crime passionnel.

Très cher ami et AINE ANCIEN VOGTOIS,

Contrairement au Mariage pour lequel l’intelligence humaine n’a pas encore trouvé de solution pertinente à la gestion des incompatibilités au sein du couple, les banquiers anglo-saxons ont depuis le 15e siècle inventé un instrument de financement des secteurs potentiellement rentables au sein des organisations, y compris celles situation en quasi-faillite telles qu’un Etat mis sous ajustement structurel. Cet instrument est appelé de manière générique la « Project Finance » toutefois,  lorsqu’il est mobilisé dans le domaine de la gouvernance des Affaires publique il prend la dénomination de … PARTENARIATS PUBLIC-PRIVES.

LA MISE EN ŒUVRE DES PARTENARIATS PUBLIC-PRIVES CONSTITUE LA GIGANTESQUE FENETRE D’OPPORTUNITES DONT J’AI PARLE PLUS HAUT, POUR NON SEULEMENT SAUVER NOTRE PAYS DE LA SITUATION CRITIQUE QUE TA NOTE DECRIT DE MANIERE DECAPANTE… MAIS HELAS PERTINENTE, MAIS AUSSI ET SURTOUT POUR LE METTRE RESOLUMENT SUR LE CHEMIN D’UNE CROISSANCE DURABLE QUI LE CONDUIRA DANS LE CERCLE DES NATIONS EMERGENTES. J’EN EXPLIQUERAI LE MODE OPERATOIRE DANS LA TROISIEME PARTIE DU TEXTE.

J’en ai terminé avec l’explication du Titre de ta Note de politique économique. Mes lecteurs les moins endurants savent désormais dans quelle situation se trouve notre Pays et peuvent s’ils le souhaitent, suspendre leur lecture à ce niveau de mon texte.

  1. MA LECTURE DE TA NOTE RAPIDE DE POLITIQUE ECONOMIQUE ADRESSEE AU GOUVERNEMENT DE LA REPUBLIQUE

Apres avoir planté le décor, tu identifies de nombreuses carences structurelles qui replongent notre Pays dans l’ajustement structurel, quinze ans seulement après en être sorti. Examinons ensemble quelques-unes des dites carences structurelles.

  1. SUR LA POLITIQUE MONETAIRE

Nous opinions convergent lorsque que tu écris  « L’avenir du Franc CFA est dans un cul de sac et sans lendemain ». Mais lorsque tu proposes à notre Pays de se positionner IMMEDIATEMENT comme chef de file d’une souveraineté monétaire  des Etats de la Sous-Région, je ne suis plus d’accord avec toi. Parce que pour moi  LA CEMAC NE NOUS SERT A RIEN !! (sorry je ne suis pas diplomate).

Ma conviction est qu’une souveraine monétaire du Cameroun ne peut s’envisager que dans le cadre d’une Zone monétaire qui regrouperait obligatoirement le Cameroun et le Nigeria. Ce binôme monétaire aspirera NATURELLEMENT  tous les autres Pays membres de la CEMAC (voire de la CEEAC)  d’une part, et de l’UEMOA d’autre part, pour constituer une gigantesque union monétaire regroupant entre 20 et 25 Pays. Cette monnaie commune à 25 Pays va deviendra le facilitateur des échanges économiques dans le Cadre de la Zone de Libre-échange Continentale Africaine (ZLECAF). A l’instar de tes collègues économistes tu ne manqueras pas de me poser le problème de la conciliation entre le taux de l’inflation qui est à 18% au Nigeria, et aux alentours de 2% chez ses voisins des deux zones monétaires de la CEMAC et de l’UEMOA. Le job des grands experts comme toi est de résoudre ce genre de problèmes et non de les afficher comme des obstacles insurmontables. Je pense que l’un des axes stratégiques de la diplomatie entre le Cameroun et le Nigeria devrait être orienté vers ce rapprochement monétaire.

En attendant  Grand frère, je ne partagerai non plus ton avis lorsque tu écris « Les incertitudes et les atermoiements sur la question monétaire, qui inclut la gestion et l’avenir immédiat du FCFA ne sont pas compatibles avec les objectifs de développement à long terme de la SND30 ».

Parce que la population de notre Pays est majoritairement jeune, et fortement consommatrice de biens que nous ne produisons pas (encore) et devons importer. LE FRANC CFA NOUS PERMET DE STABILISER LES PRIX A L’IMPORTATION DE CES BIENS CONSOMMES PAR CETTE POPULATION JEUNE, EN ATTENDANT LE DEVELOPPEMENT D’UNE PRODUCTION LOCALE  DE SUBSTITUTION, DONT LA MISE EN PLACE NECESSITERA ELLE AUSSI L’IMPORTATION DE MACHINES…

Enfin Grand frère, j’ai été très amusé par l’encadré dans lequel tu écris ceci :

« À titre d’illustration et pour le citoyen ordinaire, la rareté actuelle des pièces de monnaie et des petites coupures de billet de banque au Cameroun, crée et maintient une inflation artificielle qui n’encourage pas la consommation et par ricochet la production. Cela dure bientôt dix ans et le phénomène s’accentue malgré les déclarations de la BEAC d’y remédier.

Oui, les chinois exportent les pièces de monnaie de la zone CFA/CEMAC, mais pourquoi ces Chinois ne sont pas friands des CENTS américains ou des CENTIMES d’Euros? » Fin de citation.

Je ne suis pas capable de te répondre, mais je suis au devoir de te dire que les pièces de monnaies et les petites coupures de billet sont appelées à disparaitre. A brève échéance elles seront remplacées par LA MONNAIE NUMERIQUE DE BANQUE CENTRALE, qui sera conservée sur nos téléphones, dans une application appelée portefeuille  numérique. Les travaux du Département  des marchés monétaires et de capitaux sont très avancés sur la question. Les Bahamas ont déjà une monnaie numérique de banque centrale, et elle est en cours de test en Chine. Beaucoup d’autres pays sont en train d’essayer ou d’analyser cette possibilité.

  1. SUR LA POLITIQUE BUDGETAIRE ET DE LA DETTE

Sur ce point cher ainé, lorsque tu écris, « Une fois de plus, comme le DSCE, la SND30 n’aura pas de vie tout comme ce fut le cas du 5è plan quinquennal (1986-1990)… »,  tu atteins les sommets de l’Himalaya en termes de pessimisme. Je t’ai si souvent connu dans de meilleures dispositions d’esprit…

Je ne doute pas que c’est l’expérience de l’économiste ayant passé la moitié de sa carrière à gérer les problématiques d’ajustement structurel qui s’exprime. Mais dois-je te rappeler que nous n’avons pas perdu tous les acquis du premier et long ajustement structurel, auquel tu as consacré les 15 premières années de ta carrière d’économiste et statisticien au sein de l’Etat ?

La situation de notre Pays est complexe. Et c’est un euphémisme. La demande sociale est de plus en plus exigeante, à un point tel que certains concitoyens font le choix de prendre les armes. Seule une relance économique forte telle que celle prévue dans la SND30 pourrait permettre à l’Etat de se doter d’une nouvelle légitimité, en apportant la juste réponse à cette demande sociale, tout en préservant la sécurité des personnes et des biens, SUR L’ENSEMBLE DU TERRITOIRE NATIONAL.

La sécurité des personnes et des biens constitue un BIEN INTANGIBLE auquel on ne commence à donner sa juste valeur…que le jour où elle est fortement compromise. A titre d’illustration, chez nos voisins du Nigéria, les prix des produits alimentaire ont  augmenté de 25% au cours du seul mois de mai 2021, à cause de l’insécurité grandissante dans les régions agricoles du Nord-Ouest de ce Pays. Les agriculteurs qui sont obligés de payer les groupes de bandits pour pouvoir se rendre dans leurs plantations ont préférés abandonner leurs activités agricoles, ce qui a provoqué une grave pénurie de produits alimentaire et une inflation sans précédent.

NOTRE PAYS NE PEUT PAS SE PERMETTRE DE SUSPENDRE LA MISE ŒUVRE DE DE LA SND30. C’EST POLITIQUEMENT INTENABLE ET SOCIALEMENT SUICIDAIRE. POUR  NOS ENFANTS CE N’EST MEME PAS UNE OPTION A ENVISAGER GRAND FRERE !!!     

  1. CONCERNANT LES POLITIQUES STRUCTURELLES

Tu écris : « Le choix fait dans la SND30 d’opter pour l’import-substitution devrait s’accompagner sur le plan légal et réglementaire, des mesures visibles d’incitation à la préférence nationale et de protection du territoire économique national… Pour le citoyen ordinaire, cette transformation structurelle devrait être visible et perceptible à travers une offre abondante des produits de consommation courante « made in Cameroun »…  Fin de citation.

Ta proposition protectionniste relative à «la préférence nationale et de protection du territoire économique national… »   est  contraire  aux  Engagements pris par notre Pays dans le cadre de la mise en œuvre de la Zone de libre-échange continentale Africaine (ZLECAF), fondés sur une PREFERENCE COMMUNAUTAIRE ET LA PROTECTION DU TERRITOIRE ECONOMIQUE CONTINENTAL AFRICAIN.

DANS CE CONTEXTE DE MISE EN PLACE DE LA ZLECAF, NOTRE PAYS N’A PAS D’AUTRE OPTION QUE D’ENGAGER UN PROGRAMME VOLONTARISTE DE DEVELOPPEMENT DE SA PRODUCTION AGRICOLE ET INDUSTRIELLE, QUI VIENDRA SE SUSTITUER AUX IMPORTATIONS ACTUELLES PROVENANT D’ASIE, TOUT EN EVITANT QUE NOTRE MARCHE SOIT OCCUPE PAR LES IMPORTATIONS PROVENANT DES AUTRES PAYS AFRICAINS MEMBRES DE LA ZLECAF.

J’AI DEJA ADRESSE AU GOUVERNEMENT DE LA REPUBLIQUE, VIA NOTRE CAMARADE ANCIEN VOGTOIS, LE MINISTRE ACHILLE BASSILEKIN 3 EN CHARGE DES PME, UNE PROPOSITION DE CETTE NATURE.

  1. CONCERNANT LES POLITIQUES D’INCLUSION ET D’EQUITE SOCIALE : LE CAS TRES SPECIAL DE LA COUVERTURE SANITAIRE UNIVERSELLE

C’est incontestablement le chantier sur lequel le Gouvernement du Renouveau n’a plus droit à la moindre erreur. Les fractures sociales sont nombreuses et profondes, et nous avons déjà appuyé à son maximum, le bouton de l’inéquité sociale.

Le plus important (et le plus titanesque) chantier sur le chemin de l’inclusion et l’équité sociale est très certainement celui de la réalisation de la Couverture Sanitaire Universelle. Il s’agit d’un engagement supranational sous la houlette de l’Organisation Mondiale de la santé, pris par tous les chefs d’Etat, de gouvernement et représentants des Etats, réunis au  Siege de l’Organisation des Nations Unies le 23 septembre 2019, dans le cadre d’une réunion dite de haut niveau sur la Couverture Sanitaire Universelle.

Au terme de cette réunion, une déclaration politique intitulée « Couverture sanitaire universelle : œuvrer ensemble pour un monde en meilleure santé » a été adoptée en Assemblée générale. Dans cette déclaration en son paragraphe 83 les Etats Membres de L’organisation des Nations Unies « Décident de convoquer une réunion de haut niveau sur la couverture sanitaire universelle en 2023 à New York, en vue d’entreprendre un examen complet de l’application de la présente déclaration pour identifier les lacunes existantes et les solutions envisageables afin  d’accélérer les progrès vers la mise en place d’une  couverture sanitaire universelle d’ici à 2030 »

Il résulte de ce qui précède que la Couverture sanitaire Universelle constitue un Chantier prioritaire à réaliser obligatoirement, y compris dans un contexte d’Ajustement Structurel. La SND30 a prévu 12.500 milliards de FCFA par financement direct de l’Etat pour sa réalisation tandis que mon modèle établit le coût des investissements au titre de sa réalisation à environ 19.000 milliards de FCFA dans le cadre d’un financement par PPP.  Un Projet de Loi sur la Couverture Sanitaire Universelle est en cours d’élaboration à la Présidence de la République. La principale complexité est le financement, la réalisation et la gestion des équipements qui seront affectés à la Couverture Sanitaire Universelle.

Avec une curieuses précipitation, le Gouvernement a été amené à établir un contrat de partenariat il y a bientôt un  an, avec une entreprise qui confond clairement le concept de Couverture Sanitaire Universelle  avec celui de Mutuelle de Santé. J’ai été étonné d’entendre le Ministre de la Santé Publique, s’adressant aux Députés, continuer d’apporter son soutien à cette entreprise totalement défaillante…

La SND30 prévoit 12.500 milliards FCFA d’investissements publics lissés sur 9 ans désormais pour la réalisation de la CSU, soit 1400 milliards de FCFA par an. Ce qui est matériellement impossible, que nous nous situons dans un contexte d’ajustement structurel ou non. Par ailleurs les planificateurs de la SND30 n’ont pas budgétisés la gestion et la maintenance dudit système de CSU, encore moins l’inévitable  renouvellement des équipements.

OR L’OPTION DU PPP PERMET DE MOBILISER LA TOTALITE DES 19.000 MILLIARDS DE FCFA D’UN SEUL COUP ET REALISER LA TOTALITE DES INVESTISSEMENT REQUIS EN TROIS ANS, AVEC OBLIGATION DE RESULTAT.

  1. TOUJOURS CONCERNANT LES POLITIQUES D’INCLUSION ET D’EQUITE SOCIALE : LA DECENTRALISATION COMME SOLUTION ?

En te fondant sur les résultats de la dernière enquête camerounaise auprès des ménages (ECAM 2014), laquelle enquête a révélé l’aggravation des inégalités entre les pauvres et les non-pauvres, tu questionnes les approches et méthodes mises en œuvre par le Gouvernement en vue de la Réduction de la Pauvreté.  Puis tu convoques la décentralisation « désormais actée » comme solution, dans la mesure où celle-ci devrait améliorer l’efficacité des actions en faveur des pauvres, grâce au rapprochement des centres de décisions.

Grand frère je crains de ne pas partager ton optimisme sur ce point. Parce que toi et moi le savons, les politiques gouvernementales de réduction de la pauvreté ont été davantage une source d’enrichissement pour les fonctionnaires en charge de leur mise en œuvre opérationnelle. Qu’est ce qui pourrait les inciter à transférer cette source d’enrichissement à des fonctionnaires municipaux qui ne manqueraient pas d’en faire leur « vache à lait » eux aussi ?  Les dysfonctionnements au sein de notre Fonction publique ont été dupliqués au sein de nos municipalités et bientôt au sein de nos Régions ? Est-ce parce que les chefs de ces exécutifs municipaux sont dans leur écrasante majorité des fonctionnaires retraités ?

Qu’est-ce que je propose me demanderais-tu ?

La solution de mon point de vue est LA RESOLUTION (ENFIN) DE L’EQUATION ECONOMIQUE DE LA DECENTRALISATION, POUR CHACUNE DES 360 MUNICIPALITES, PRISES INDIVIDUELLEMENT.

En quarante ans les politique dite « libérales » conduites par les élites urbaines corrompues, ont eu pour résultat une paupérisation à outrance des populations rurales. Souviens-toi il y a quarante ans, nos parents revenaient toujours du village avec leurs voitures remplies de provisions alimentaires offertes gratuitement par leurs frères vivant au village. Nos villages étaient des lieux pleins de vie où les gens étaient heureux, au point de chahuter leur Sous-Préfet du coin, à qui ils ne manquaient pas de proposer moqueusement un salaire, au lendemain de la vente de leur production de Cacao. Tout cela a disparu.

La résolution de l’équation économique de la décentralisation consiste en la restauration de cette prospérité d’antan, par l’accompagnement financier, technique et organisationnel des populations rurales dans la mise en valeur de leur patrimoine foncier, dans le cadre de 360 coopératives municipales et agro-pastorales de femmes (ce sont principalement les femmes qui travaillent dans nos villages). L’inde est désormais la 5e puissance économique mondiale (devant la France), avec une économie à  95% informelle, structurée autour de millions de très petites coopératives agro-industrielles, regroupant principalement des exploitations familiales. Elle a beaucoup de choses à nous enseigner.

Ce projet fera émerger des économies locales fortes au sein des 360 municipalités, sur lesquelles les Mairies pourront prélever des impôts Locaux, tandis que les populations retrouveront ainsi le chemin de l’autonomisation, voire de la prospérité grâce au renforcement de leur pouvoir d’achat.

LE FINANCEMENT DE LA DECENTRALISATION NE VIENDRA JAMAIS DE YAOUNDE. IL DEVRA ETRE GENERE PAR LA FORCE DE L’ECONOMIE LOCALE AU SEIN DE CHACUNE DES 360 COMMUNES.

  1. CONCERNANT LA MATURATION DES PROJETS D’INFRASTRUCTURE

La seule et unique cause de l’improductivité de notre endettement, est l’incapacité générique de notre administration publique dans la maitrise du processus de maturation des projets d’investissement. L’ETAT ACHETE TOUT ET N’IMPORTE QUOI, ET A N’IMPORTE QUEL PRIX.

Dans l’ordre normal des choses, la conception des projets complexes est le DOMAINE EXCLUSIF des ingénieurs ayant développé de solides compétences multidisciplinaires. Malheureusement ces compétences sont rares dans la fonction publique camerounaise, du fait notamment de ses politiques de recrutement, de promotion et de rémunération.  De fait même quand ces ingénieurs sont disponibles ils sont écartés de la conception des projets par les diplômés de l’Ecole Nationale d’Administration et de la Magistrature qui s’autoproclament omniscients et omnipotents, alors que dans la réalité ils sont uniquement intéressés par les subsides corruptifs liés à la mise en œuvre des dits projets.

Il faut aussi dire que, depuis la double-baisse des salaires intervenue il y a 30 ans, l’Etat est structurellement dans l’incapacité de de recruter les profils d’ingénieurs pointus requis pour assurer la conception des projets au moins jusqu’au stade des études d’ingénierie sommaires. Le fait que ce même Etat ait toujours marginalisé votre génération d’ingénieurs, qui fut la dernière à intégrer le service public en 1990, au profit des  littéraires diplômés de l’ENAM a  davantage aggravé les Choses.

Le Sénateur Benjamin Amama, lui-même ancien de l’ENAM, à l’époque où il était Ministre de la Fonction Publique, avait mesuré l’extrême a gravité du problème de pénurie d’ingénieurs au sein de notre haute administration publique. Pour le résoudre, il avait proposé la mise dans place d’un concours pour le recrutement d’ingénieurs et de scientifiques au sein de l’ENAM. SA PROPOSITION AVAIT ETE TORPILLE PAR LE PUISSANT LOBBY DES DIPLOMES DE L’ENAM QUI GOUVERNENT NOTRE PAYS, ET N’AVAIT PAS CONNU DE SUITES. LES LITTERAIRES DE L’ENAM N’AIMENT PAS LA COMPETITION. ET C’EST BIEN ICI OU SE SITUE LA « QUADRATURE DE CERCLE » DONT TU PA      RLES.

ET PUIS MEME, J’AI DEJA  EU A REALISER GRATUITEMENT DES ETUDES COMPLETES DE PROJETS QUE J’AI PROPOSE A DES ADMINISTRATIONS, LE DERNIER EN DATE A ETE TRANSMIT AU MINEPAT (POUR AVIS) PAR NOTRE CAMARADE ANCIEN VOGTOIS LE MINISTRE ACHILLE BASSILEKIN 3, DEPUIS PLUS D’UN AN !!  MEME LE DOSSIER LUI EST DESORMAIS INTROUVABLE AU MINEPAT. FORT HEUREUSEMENT NOUS SOMMES EN TRAIN DE RECONFIGURER SON FINANCEMENT SOUS LA FORME D’UN PARTENARIAT PUBLIC-PRIVE (ET NON D’UN « CONTRAT DE PARTENARIAT », UNE AUTRE IMPASSE GOUVERNEMENTALE QU’IL SERAIT FASTIDIEUX DE DECRIRE)

LE MINISTERE DE L’ECONOMIE, DE LA PLANIFICATION ET DE L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE EST UN GIGANTESQUE CIMETIERE DE PROJETS.

  1. POUR CONCLURE QUE FAIRE ? ME DEMANDERAIS-TU.

La SEULE SOLUTION POSSIBLE EST LA MISE EN ŒUVRE DES PARTENARIAT PUBLIC-PRIVE. ET C’EST-CE QUE PROPOSE LA SND30 DANS SON PARAGRAPHE N°256 QUI EST ECRIT AINSI QUE SUIT :

  1. Les financements par dettes. La levée des financements auprès des banques internationales et des Partenaires Techniques et Financiers sera soutenue par le Gouvernement à travers plusieurs mesures notamment : (i) l’actualisation et la diffusion des guides pratiques sur les modalités de financement auprès des différents guichets de financement des Partenaires Techniques et Financiers ; (ii) la mise en place d’un programme d’assistance à la mobilisation des financements internationaux auprès des Partenaires Techniques et Financiers par le secteur privé intégrant en particulier l’exigence de la préparation des projets bancables et des business plans crédibles ; (iii) la mise en place d’un programme de relèvement de l’ingénierie financière de l’Etat en vue d’une mobilisation adéquate des financement internationaux ; et (iv) l’élaboration et la mise en place d’une procédure de recherche, de négociation, de signature et de gestion des financements internationaux du Gouvernement intégrant tous les aspects critiques notamment les clauses fiscales, douanières et de mise à disposition des fonds de contrepartie.

La différence entre le Contrat du Partenariat et le Partenariat Public Privé est que l’un, le Contrat de Partenariat est fondé sur le droit Civil et l’autre, le Public-Private Partnership (PPP) est  juridiquement structuré suivant les principes du « Common Law ».

Il convient de préciser que Le « Common Law » et la Loi de l’Etat de New York aux Etats-Unis sont les seuls cadres légaux obligatoires, imposés par la communauté financière internationale, pour la réalisation et le financement des PPP internationaux. La loi Camerounaise N°2006/012 du 29 décembre 2006 fixant le régime général des contrats de partenariat est une pâle copie de l’Ordonnance française N°2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat. Or cette ordonnance française fut rédigée dans le but de garantir le monopole du financement des PPP en France, aux seules Banques et grandes entreprises Françaises. Sa transposition au Cameroun (inutile car le « Common Law » fait partie de notre arsenal légal) est inopérante car les Banques camerounaises n’ont ni la vocation, ni les compétences, ni les capacités financières requises pour accompagner la réalisation en PPP, de projets de grandes envergures techniques et financière. De fait, depuis la crise financière de 2008, et le renforcement des ratios prudentiels des Banques qui s’en sont suivis, le segment de marché du financement des grands projets à réaliser en PPP est désormais exclusivement occupé par les Agences de crédit à l’exportation des grands pays exportateurs, notamment asiatiques tels que le Japon, l’Inde et la Chine.

Last modified: 6 juillet 2021

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